Que faire pour obtenir le renouvellement de mon bail commercial ?

Mes clients ont souvent une activité « traditionnelle » (restaurant, salon de coiffure, etc..) et donc ont évidemment des locaux et un bail commercial.

Si vous n’avez pas de bail commercial, je ne sais pas si vous pouvez mesurer l’importance de ce contrat (enfin, j’imagine qu’un peu quand même, mais bon..). Pour ce type de commerces, leur bail est une source de stress énorme, les commerçants ont trimé pour développer une clientèle qui est forcément liée à ce lieu et ils ne peuvent pas se permettre de perdre cet emplacement.

Ce qui explique qu’ils deviennent très fébriles au moment du renouvellement de leur bail commercial.

Mais avant d’aborder ce point, je dois expliquer quelques petits détails. Quand je demande à mes clients quel type de bail ils ont (oui, il y en a plusieurs), ils ne me répondent pas « Bail Commercial » mais plutôt 3/6/9.

Je suis sure que vous avez déjà entendu ce terme. Il fait référence à la durée du bail commercial : il est en principe de 9 ans mais peut être résilié (uniquement par le locataire) à la date anniversaire des 3 ans ou des 6 ans.

Et donc quand se rapproche la date fatidique des 9 ans, les commerçants stressent et souvent font des bêtises. La plus commune est d’appeler son bailleur pour lui demander si on peut renouveler le bail. Vous vous demandez sans doute pourquoi c’est une erreur, cela semble au contraire un comportement plutôt censé et responsable. Mais malheureusement, c’est souvent la première d’une série d’autres erreurs.

Donc, après avoir pris son courage à deux mains, le locataire demande son renouvellement et la réponse la plus courante qu’il obtient est « Mais oui, bien sur ! ». Il est soulagé, content, il vient de sauver son activité commerciale, mais évidemment, la conversation continue.

Le propriétaire lui dit « oui, enfin, faut qu’on discute du NOUVEAU loyer, parce que dans le quartier, les prix flambent et j’ai des demandes tous les jours d’autres locataires ! Mais bon, je vous aime bien, alors, je vous propose qu’on augmente seulement de 25% le montant du loyer ».

A ce stade, le locataire (on dit en réalité le preneur en matière de bail commercial) a du mal à avaler sa salive. Il commence à discuter « 25%, c’est beaucoup, etc… ». Au terme d’une longue conversation, il arrache un 15% d’augmentation et il est tout content !

Dans une autre version de cette histoire, le preneur a affaire non pas à son bailleur directement mais à une agence qui gère le bien. Rebelote, appel, question, et la réponse est différente « Oui, bon, ok, on va vous le renouveler, il faut qu’on rédige un nouveau bail, donc, le prix c’est 5.000 euros » (je précise tout de suite pour ceux qui s’étouffent en lisant les montants que ce sont de vrais exemples arrivés à mes clients…). Et là, le locataire tire encore un peu la langue et se dit «  5.000 euros, c’est cher pour un bail, encore un avocat qui s’enrichit à tous les coups ! Mais bon, au moins, je suis tranquille pour 9 ans de plus, ça vaut le coup ! » et accepte et donc paye !

Il m’est arrivé une fois d’avoir le client au téléphone AVANT qu’il paie (il voulait quand même vérifier qu’il ne faisait pas de bêtise), je me souviens lui avoir dit en hurlant « JE VOUS INTERDIS DE PAYER !! » (oui, parfois, je dépasse un peu les bornes).

Et si vous vous demandez pourquoi cela m’a mis tellement en colère, la réponse est simple : c’est parce qu’un preneur de bail commercial a DROIT au renouvellement de son bail. C’est aussi bête que cela. C’est le principe même du bail commercial, il se renouvelle par périodes de 9 ans et dans les mêmes conditions que le précédent (et donc au même loyer). Et autre petit détail qui a son importance, le loyer du bail commercial est plafonné pendant toute sa durée. Cela veut dire qu’on peut l’augmenter mais seulement en appliquant un indice INSEE soit tous les ans, soit tous les 3 ans.

Donc, clairement, un bailleur ou une agence qui propose soit de faire payer ce renouvellement, soit d’augmenter fortement le loyer, pour moi, on est à la limite de l’arnaque (ok, c’est légal si le commerçant l’a accepté, mais cela ne rend pas cela plus moral pour autant…).

D’ailleurs, dans la série des « petites arnaques », il y en a une autre qui a lieu au moment du renouvellement. Notre commerçant toujours stressé appelle donc son propriétaire pour le bail et à sa question, il a une réponse formidable « Mais oui, bien sur, je vous renouvelle, mais non, pas la peine d’écrire quoi que ce soit, on est entre nous, on se fait confiance ! ». Et il ne se passe rien.

Le bail continue de courir, pendant un an, pendant 2 ans, pendant 3 ans. Notre commerçant est content ! Sauf qu’après les 3 ans, il reçoit la visite d’un huissier qui lui explique que son bail a duré 12 ans sans avoir été (officiellement) renouvelé et que maintenant le propriétaire peut augmenter fortement le loyer. C’est fatal et dans un cas pareil, ne m’appelez pas, je ne peux rien faire (Bon, en réalité, vous pouvez m’appeler, on se battra sur le montant du nouveau loyer, mais il sera forcément augmenté…).

Donc, si vous avez tout suivi, vous vous demandez sans doute « Ok, sandra, mais j’ai pas compris un truc, d’un côté, tu dis qu’on a le droit au renouvellement, donc pas la peine de faire un nouveau bail et de l’autre, tu dis qu’il faut un renouvellement officiel !! Je comprends plus rien ».

En fait, c’est assez simple, si vous avez un bail et qu’il approche de son terme, il faut simplement prendre une petite précaution : demander le renouvellement de votre bail par écrit (on peut maintenant le faire en courrier recommandé A.R et 6 mois avant la fin du bail). Et si votre bailleur ne répond rien dans les 3 mois, c’est bon, vous avez obtenu officiellement votre renouvellement de bail.

Donc, surtout, si vous envoyez ce courrier, gardez bien la copie et l’accusé de réception (d’ailleurs, vérifiez bien de l’avoir, certains bailleurs sont malins et ne vont pas les chercher ! et dans ce cas, allez voir un huissier pour qu’ils signifient directement votre courrier) et voilà, vous savez que vous avez bien un bail qui redémarre pour 9 ans au même loyer que le précédent !

Petite précision : ces articles ont vocation à vous donner une information juridique « de base » et aussi quelques réflexes pratiques. Mais le bail commercial est une matière vraiment complexe, donc, en cas de doute, surtout consultez quelqu’un (et même éventuellement moi) !

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