Ma nouvelle offre

Ma nouvelle offre ou « comment je n’ai pas voulu devenir un taxi parisien »

Dans mon article sur mon bilan de fin d’année, j’avais expliqué qu’en 2016 j’ai consacré beaucoup de temps à réfléchir à ma nouvelle offre et aussi à mettre en place mon site internet.

Depuis que j’ai lancé le site mais aussi décidé de communiquer sur les réseaux sociaux, de nombreux clients me demandent « mais pourquoi ? » et je leur réponds « parce que je n’ai pas voulu devenir un taxi parisien ! ».

Je m’explique : depuis deux ans environ, les « legal tech » sont apparus en France. J’imagine que la plupart d’entre vous ne savent pas forcément de quoi il s’agit : Des start-up qui veulent ubériser la profession d’avocat. C’est à dire offrir des prestations juridiques à moindre coût.

Dès 2015, j’avais beaucoup lu sur le sujet, beaucoup discuté et j’en étais arrivé à la conclusion (que beaucoup partagent évidemment, je n’ai rien inventé…) que les clients sont souvent globalement satisfaits de leur avocat mais une critique récurrente revient : les honoraires !

La difficulté ne vient pas réellement du prix mais plutôt du manque de visibilité. Quand on fait appel à son avocat, on ne sait jamais vraiment combien cela va nous coûter. Tous les clients vous diront qu’ils ont eu des sueurs froides au moment d’ouvrir la facture.

Et je considère que c’est notre erreur, à nous les avocats. Nous ne communiquons pas assez sur le sujet. C’est sur ce créneau que se sont (en partie) lancés ces legal tech.

Au début, beaucoup de confrères se sont contentés de râler ou de ricaner. Personnellement, je me suis dit que c’était une opportunité de réfléchir et de se remettre en question. Quand Uber s’est lancé à Paris, cela a été tout de suite un énorme succès et pour une raison très simple : leur prestation était bien meilleure que celle des taxis parisiens !

Pour tous ceux qui parmi mes lecteurs ont déjà pris un taxi parisien, vous voyez bien de quoi je parle : on avait du mal à en trouver un quand on en cherchait, le chauffeur n’était en général pas très sympathique, la voiture moyennement propre et il n’y avait jamais, jamais, jamais d’appareil à carte bleue ! Et là, Uber arrive et a tout compris : un chauffeur qui vous tient la porte, vous propose une bouteille d’eau, un chargeur de téléphone si besoin, et vous n’avez même pas à payer, votre CB étant déjà enregistrée !

Alors, il est vrai qu’en plus, c’était un petit moins cher mais je crois sincèrement que pour les clients, ce n’était pas la vraie raison du succès. La différence résidait vraiment dans la qualité du service rendu.

Et pour moi, les taxis étaient à l’origine de leurs propres difficultés, ils auraient du se remettre en question, proposer des services qui répondaient aux besoins des clients ! Et c’est précisément ce que j’ai voulu faire : ne pas me contenter de dédaigner ces legal tech en me remontant le moral parce que j’ai mon titre d’avocat mais au contraire m’inspirer d’eux, utiliser leurs bonnes idées pour améliorer ma prestation et éviter ainsi le sort des taxis parisiens !

Donc, que proposent ces legal tech ? C’est très simple : leurs tarifs sont en ligne et à moindre coût. De prime abord, certaines proposent des offres vraiment intéressantes. Par exemple, dans mon domaine de spécialité, vous avez des sites qui proposent de vous rédiger vos statuts en ligne pour 600 euros HT !

Sauf qu’évidemment, il y a pour moi plusieurs soucis : tout d’abord, leur prestation repose sur des actes automatisés, générés par des algorithmes. Je vous donne un exemple : vous voulez créer votre société. Vous devez répondre à la première question : quel forme de société voulez vous ? SAS ou SARL ?

Et là, premier problème : personne ne vous conseille sur la forme la plus adaptée à votre projet. Alors, si vous cliquez un peu partout, vous avez des pistes de réponse : dans un cas, vous êtes TNS (travailleur non salarié), dans l’autre Assimilé-Salarié. Ok, mais cela ne répond toujours pas à votre question : quel est le mieux pour vous ??? D’autant que je connais peu de clients qui savent vraiment la différence.

Quand mes clients entendent « assimilé-salarié », ils s’imaginent que c’est un statut de salarié, mais cela n’a rien à voir ! Et cela, le très beau site de cette legal tech ne sait pas vous l’expliquer et surtout ne sait pas vous faire la bonne recommandation. Alors, qu’un avocat spécialisé, lui, peut… J

Donc, pour ma nouvelle offre, j’ai décidé de prendre le meilleur des legal tech tout en gardant le meilleur de ma profession : le vrai conseil juridique, le sur-mesure pour chaque client.

C’est ainsi que j’ai décidé :

  • D’afficher uniquement des prix forfaitaires ;
  • De proposer des prix accessibles à mes clients (TPE et PME).

Cela a représenté un travail énorme que je ne mesurais pas vraiment quand je me suis décidée :

  • lister l’ensemble des prestations que mon cabinet propose ;
  • déterminer un prix forfaitaire applicable et pour cela, il fallait calculer le plus précisément possible le temps passé sur chaque dossier ;
  • essayer de fixer le prix le plus abordable possible pour mes clients ;
  • Mettre en place des outils de relation-client pour gagner du temps dans le traitement des dossiers et ainsi réduire le coût.

Je vous épargne aussi les doutes : « est ce que c’est le bon choix ? la bonne méthode ? est ce que je ne vais pas le regretter ? est ce que cela ne donne pas une vision plus « cheap » de mon travail ? ». J’en ai beaucoup parlé avec mes clients, parce qu’après tout c’était avant tout que je le faisais. Ils ont tous validé ma démarche en me donnant de très bons conseils d’ailleurs (par exemple, j’hésitais pour mes forfaits à les appeler des packs (ce que je faisais en réalité depuis plusieurs années), mais la majorité de mes clients trouvaient que cela faisait penser à des packs de bouteilles d’eau, donc je suis restée sur le mot « forfaits »). Enfin, bref, beaucoup, beaucoup de travail et de réflexion sur un projet que je ne pensais pas aussi prenant.

En réalité, cela ne change pas vraiment ma façon de travailler. J’ai toujours essayé de pratiquer au maximum des prix forfaitaires, mais je les donnais à chaque fois au cas pour cas. Mais pour mon site, il fallait tout lancer en même temps (je dis ça alors que, hum, hum, je n’ai pas encore saisi tous mes tarifs sur le site…).

Autre point de détail non négligeable que certains de mes confrères et amis m’ont gentiment fait remarquer au lancement de mon site : « mais du coup, tu ne peux plus adapter tes prix à tes clients ?? ». Pour ceux qui n’auraient pas compris, cela veut dire qu’effectivement, je ne peux plus facturer à la tête du client…Donc, si la société de mon client fait 10 millions de Chiffre d’Affaires, je facture la même chose qu’une toute petite entreprise qui démarre. Et oui, j’ai renoncé à cette petite marge en plus… J Mais pour être honnête, elle ne me semblait pas justifiée, dans la mesure où la prestation si je fais un dépôt de marque est exactement la même pour quelqu’un en solo que pour une entreprise déjà bien installée.

J’ai donc fixé les prix uniquement par rapport au travail que j’ai à fournir. Cela fait maintenant presque deux mois que mon site est en ligne. Il reste encore quelques détails à fignoler (mettre en ligne les références de mes clients pour ceux qui ont accepté, rédiger ma bio (oui, j’avais oublié cela et c’est un client qui m’y a fait pensé !), saisir les tarifs manquants). Mais les premiers retours sont plutôt positifs.

A titre personnel, je suis ravie. Cela m’a obligé à réfléchir sur mon métier, comment je veux l’exercer, ce que je propose de plus à mes clients et c’est vraiment un exercice passionnant ! Je pourrais faire un point en fin d’année pour voir si cela a vraiment changé la donne pour mon cabinet et bien sur, je ferai un petit article pour vous en parler.

Et vous, est ce que les nouvelles technologies vous ont obligé à vous remettre en question dans votre activité professionnelle ?

 

Aucun commentaire

William

Merci Sandra pour ta réflexion sur l’uberisation de toutes professions qu’elles soient.
Quand le fait est là le dénigrer ne sert pas mais réfléchir à pourquoi permet de proposer une offre adaptée.
Je te souhaite de grand succès.
Au plaisir

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Sandra Azria

Merci beaucoup de tes encouragements ! Je suis d’accord, il vaut mieux saisir ces changements pour en faire une réflexion utile et se remettre en question !

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